Il y a d’abord eu le copain avec qui on coupait le pain, puis est venu le colocataire qui nous courait sur les nerfs, le codétenu auquel on était tenu, le coéquipier, qui nous cassait les pieds, le coexistant pas toujours marrant, le cohéritier toujours intéressé, le collabo toujours prêt, et ne parlons pas du co-con. Et puis il y a eu le covide, et on a enfin eu la paix…
Plus rien à partager, à négocier, rien que le vide en commun.
Depuis la fin du confinement les quais de métro ressemblent à des cours d’école maternelle avec des ronds, ou des lignes dessinés au sol pour bien se ranger.
Des études d’experts ont en effet prouvé que le virus déteste l’ordre et qu’il se multiplie dans le désordre.
Par exemple si vous êtes rangés en paquets de dix n’importe comment, même à un mètre les uns des autres, figurez-vous que ça excite le virus. Il saute de votre masque pour aller copuler dans le nez de la personne d’à côté.
Alors que quand chacun se met sur la ligne ou le rond, ça ramollit le virus. Les lignes droites ça l’excite pas.
Pareil, si tu t’assois à coté de quelqu’un dans le métro, le virus se jette sur toi direct ! Alors que si tu restes debout collé contre ton voisin qui n’a pas pu s’asseoir non plus, à cause de l’autocollant qui dit que c’est dangereux et interdit de s’asseoir côte à côte, ben là t’es en mode furtif, incognito. Le virus ne te voit pas si t’es debout à côté d’un assis ! Mais le mieux c’est encore d’être debout les deux pieds sur un autocollant qui dit de maintenir les distances de sécurité, là tu crains vraiment plus rien.
Je sais par ailleurs de source sûre que les autocollants d’interdiction de s’asseoir sont en fait des pièges à virus, faut faire hyper gaffe.
Là je viens d’arriver à Montpellier et, comme à la capitale, y a des autocollants partout et des types supers autoritaires pour verbaliser les irresponsables qui se trimballent sans masques.
Sur le trottoir à l’arrêt du tram, y a une jolie ligne à un mètre du bord qui dit :
Qu’est ce qu’ils sont intelligents nos dirigeants !
Déjà ils avaient fait fort en devinant que le virus pondait ses œufs sur les étalages des marchés en plein air. Heureusement, il y avait les supermarchés sécurisés.
Nous on se disait naïvement qu’il y avait moins de risque dehors avec des commerçants qui nous servent, qu’avec l’air conditionné et tous les gens qu’on croise et qui touchent à tout dans un supermarché. On l’a échappé belle !
Et les parcs, les plages, les forêts, faut pas croire, ils ont découvert que le virus se met en guet apens sur les feuilles des arbres ou dans le sable et profite du premier coup de vent pour surfer jusqu’à nos narines, et traverser les masques.
Vicieux non ?
On croyait comme des ignares qu’il valait mieux être dans la nature, plutôt que de marcher en ville sur des trottoirs bondés. On a eu chaud !
On a même cru à un moment que le virus n’était pas si méchant et que si les gens mouraient, c’était à cause du manque de moyens à l’hôpital et dans les EHPAD.
Nan mais n’importe quoi, heureusement qu’ils nous ont expliqué que c’était nous le problème. Faut dire que certains crétins dépassaient le périmètre de sécurité et le temps de sortie autorisé et faisaient des apéros avec leurs voisins. Heureusement on les a eu à l’œil, on les a dénoncés, on a été des citoyens responsables. C’est pourtant pas compliqué, si on fait bien attention, télétravail, geste barrières, ça va se régler tout seul. Et cerise sur le gâteau ; pas besoin de dépenser pour l’hôpital, ou de repenser les EHPAD, en plus on s’épargne les collègues et les soirées pénibles. Le message est simple, la consigne efficace : chacun chez soi et les GAFA pour tous ! On ne demande pas de réfléchir, il suffit d’obéir, c’est quand même pas compliqué.
Dans quelques années, si j’ai des petits-enfants et que je leur raconte qu’avant toute cette histoire, partout dans le monde des gens se rassemblaient pour contester la violence néo-libérale et repenser nos liens avec le vivant et avec les autres en termes d’interdépendance plutôt que de concurrence ou d’exploitation. Quand je leur dirai qu’on s’autorisait à critiquer les décisions des gouvernements et qu’on manifestait dans la rue, ils me répondront :
-« Eh ben dis-donc mamie, heureusement que depuis y a la dictature Covid, au moins maintenant, on est en sécurité ! »
Karine Mazel
très beau texte
merci beaucoup
ai été covidée 2 mois et suis plus inquiète des violences sociales qui favorisent l’épidémie que du virus
qui occasionne certes une sécrée traveersée de symptomes et de failes, mais n’est mortel que si on est vieux, pauvre, ou faible, voici les personnes et les coeurs des personnes dont il faudrait enfin s’occupper correctement
encore une fois on ne s’occupe pas des crevasses où il est vraiment dangereux : les crevasses de notre société
c’est elles qui faut soigner
trois passages aux urgences, deux mois sans aucune force me l’ont encore infailliblement démontré
belles journées
Jeanne
SignalerMeuh non ils diront pas ça tes petits enfants ! La graine d’ananar se transmet ! C’est pas parce que les GAFAM n’en parlent pas...
Ils ont plus peur qu’on ne le croit, qu’on ne le sait... Voir l’affaire Ruffin/LVMH.
On n’a pas assez confiance dans notre puissance. Je crois que nous ne devons jamais cesser d’encourager la désobéissance (et j’appelle pas désobéir ne pas mettre de masques en toutes circonstances ! D’ailleurs je le mets systématiquement en manif 😅😇😷 )
Jamais cesser de valoriser les pieds qui dépassent des ronds et des lignes, des trous de souris où "ils" voudraient bien nous confiner, les roitelets au pouvoir.
Ton papier est bien tourné, il dit bien le ridicule des décisions prises, mais il finit mal. Projection d’un échec ! Non, au moins ne pas projeter l’échec ! Même les jours de déprime…
Bonjour Karine,
Merci bravo, bien vu et simplement formulé. J’imagine que tu as dû en rayer, des mots et des lignes, pour ne pas laisser transparaître la colère...
Je crois que ces marques au sol font partie des mesures d’abêtissement programmé qui remplacent la délicate entreprise d’un entrainement à l’attention soutenue et au respect.
Respect des autres, respect des Vieux, respect de soi-même.
Salut à toutes !
Didier
Je ne comprends pas ton post Karine ! Voilà pour ma part ce que j’ai fait suivre ici où là :
Quand je porte un masque en public et surtout dans les magasins.....
🔵 Je veux que vous sachiez que je comprends le minimum de ce qu’est un virus, ce virus, pour savoir que je pourrais être asymptomatique et vous donner encore le virus.
🔵 non, je ne "vis pas dans la peur" du virus ; je veux juste faire partie de la solution, pas du problème.
🔵 Je n’ai pas l’impression que le "gouvernement me contrôle". J’ai l’impression d’être une adulte contribuant à la santé publique dans notre société. Je suis libre et responsable ( pléonasme ?)
🔵 Si nous pouvions tous vivre avec la considération des autres à l’esprit, le monde entier serait un bien meilleur endroit.
🔵 Porter un masque ne me rend pas faible, effrayée, bête ou même " contrôlée ». Ça me rend attentionnée et solidaire.
🔵 Quand vous pensez à votre apparence, à votre inconfort, ou à l’opinion qu’ont les autres de vous, imaginez un proche - un enfant, un père, une mère, un grand-parent, une tante, un oncle ou un étranger - placé sous un respirateur, seul sans vous ni aucun membre de la famille qui soit autorisé à son chevet.
🔵 Demandez-vous si vous auriez pu les aider un peu en portant un masque.
Copié et posté. Qui va faire pareil ?
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