Voici le premier podcast de la série Portraits d’habitant.e.s de la Cité Émile
Dubois à Aubervilliers produit par Les Allumeur.e.s et La Fontanelle, dans le cadre
de la recherche création qui a donné l’occasion de réaliser en partenariat avec L’Insatiable la publication Microcosme, murmures d’une Cité....
Réalisation Nacaja Apo Xtazica, Catie Evezard et Rémi Guirimand de La Fontanelle à partir d’entretiens menés par Tecla Raynaud Rispal, Zsazsa Mercury et Héloïse Humbert.
Microcosme #Murmures d’une Cité est une recherche création, un work in progress du groupe d’action artistique Les Allumeur.e.s, de la webradio « sensible et politique » la Fontanelle et de L’Insatiable. Elle s’est inventée en 2020 dans la Cité Émile Dubois à Aubervilliers.
Quand la ville est transformée, souvent on détruit. Derrière la démolition d’appartements parfois vétustes, il y a des histoires, des vies, un tissu de rencontres et de cultures, des souvenirs. Rendre audible et visible l’avis des habitant.e.s sur les transformations de leur quartier, comprendre les mécanismes d’aménagement urbain, rencontrer les associations et acteurs locaux, explorer l’histoire des banlieues et de l’immigration, recueillir des traces de ce qui se vit et se fait : tout cela a constitué la première étape du projet Microcosme qui a donné lieu à une édition. Nous poursuivons cette recherche en proposant, à partir de mai 2021 et chaque premier mercredi du mois, un portrait d’habitant.e de la Cité Émile Dubois.
Ce podcast
est une conversation avec la première habitante rencontrée au tout début de notre recherche-création dans ces Jardins ouvriers des vertus qui se sont trouvés sur notre route. Avec eux valsait la farandole d’éléments de langage qu’on retrouve dans les lignes gouvernementales et de multiples appels à projets : le lien social, la mixité, le vivre-ensemble, la démocratie participative, les valeurs de la République, sous forme spontanée d’utopie végétale et humaine. Pas la peine de compter uniquement sur des artistes comme nous pour le faire, le lien social et la mixité existent, il faut simplement laisser de l’espace pour leur épanouissement. Les Allumeur.e.s travaillent à Aubervilliers depuis 15 ans, avec beaucoup d’attachement à cette ville Tout-Monde qui nourrit nos pratiques, dans le partage, l’exploration, l’expérimentation et la co-création. Nous sommes soutenu.e.s depuis 12 ans par la municipalité et différentes institutions rattachées au Ministère de la culture, au Ministère de la cohésion des territoires ou aux Politiques de la ville ; mais surtout par des personnes qui nous font confiance au sein de ces institutions.
Malgré la précarité de cette situation associative qui nous impose d’être financés essentiellement projet par projet, ces financements permettent de rémunérer tout un écosystème de gens, et ils permettent aussi aux projets artistiques d’exister. La ville d’Aubervilliers soutenant le projet de solarium, qui va détruire une partie des jardins des vertus, dont il est question dans ce podcast, notre situation dans ce contexte est très délicate et révèle la fragilité de nos financements, de nos moyens de subsistance et de création. Mais à l’endroit où nous sommes, artistes tous terrains, précaires, militant.e.s associatifs, doux rêveurs et douces rêveuses énervé.e.s, comment pourrions-nous être contre ces jardins ?
« Le Fort d’Aubervilliers, aux frontières de Pantin et de La Courneuve a été racheté par une agence foncière de l’État en 1973, aujourd’hui Grand Paris Aménagement. Depuis 10 ans, un projet d’aménagement a démarré sur le Fort d’Aubervilliers, le futur métro (ligne 15) et les JO 2024. Dans ce contexte, 10 000 m2 des jardins ouvriers des vertus seront dédiés à un complexe aquatique comprenant une piscine d’entrainement olympique, un bassin ludique avec toboggan, un centre fitness, un spa finlandais et un solarium minéral. Tous ces équipements étant trop importants pour tenir sur le parking attenant, ils déborderont sur 10 000 m2 de parcelles des jardins ouvriers des vertus. Une promesse officielle a été de préserver ces jardins, et en compensation de leur disparition, ont été proposées des parcelles du jardin limitrophe, sur la commune de Pantin. Malgré cette compensation, ce projet représente une perte d’espace vert au sein de ce jardin centenaire, pour la ville d’Aubervilliers et ses habitant.e.s. Cette décision s’inscrit dans le projet d’écoquartier du Grand Paris et des dits « JO verts ».
Pourtant, Aubervilliers sera, une fois ces différents projets réalisés, une des communes les plus pauvres en espaces verts avec seulement 1,2 m2 par habitant-es, soit 12 fois moins d’espaces verts que Paris, et que les objectifs officiels de la Région Île-de-France, qui sont de 10 m2 par habitant.
Parallèlement, la Préfecture de région a débloqué 3,59 millions d’euros pour les jardins partagés et collectifs d’Ile-de-France, dans le cadre du plan de relance du gouvernement. En France, 17 millions d’€ sont fléchés dans le plan de relance pour le développement de jardins partagés ou collectifs (déjà existants ou à créer), dans les zones urbaines ou périurbaines. Sur ce budget, 500 000 € sont réservés à la Seine-Saint-Denis.
Si les équipements collectifs font défaut sur le quartier du Fort d’Aubervilliers, le solarium n’engendre pas un fort enthousiasme, mais le projet de piscine est de façon générale bien accueilli. « Les frais d’exploitation du complexe, à payer au promoteur SPIE Batignolles, seront d’1,7 millions d’euros par ans, en plus des frais de fonctionnement de la structure, à la charge de la municipalité. Ce coût n’est actuellement pas budgété. Les collectifs militant pour la conservation des jardins estiment entre 16 et 20 € l’entrée, dans le contexte d’un territoire dont le taux de pauvreté est de 44% en 2018 (selon les sources de l’INSEE). »
Sources : Paris Luttes Info, l’INSEE, site Aide Territoires
Parcours-affiches marouflé in situ, Cité Emile Dubois.
Création Marine Lemaire pour Les Allumeur.e.s à partir de photos argentiques prises par les habitant.e.s de la Cité Émile Dubois.