Gabi Jimenez, plasticien romano et ethnologue en terres gadji
Gabi Jimenez est un plasticien. Il se trouve qu’il est d’origine tsigane et qu’il s’intéresse depuis longtemps et de très près à la question des cultures romani. Nous l’avions rencontré la première fois il y a de ça une quinzaine d’années, à l’occasion d’un numéro important de la revue Cassandre/Horschamp intitulé L’autre sans qui je meurs et de fil en aiguille, dernièrement retrouvé à l’occasion de l’exposition Barvalo au Mucem de Marseille - qui honore pas si mal son titre de Musée des civilisations de l’Europe et de la Méditerranée - où il a fait partie du comité d’expert et est intervenu en tant qu’artiste. L’expérience de cette exposition ayant un caractère historique, il était nécessaire de l’interroger sur le sujet. Gabi a aussi réalisé la couverture du magnifique dernier livre du regretté Patrick Williams, ethnologue, auteur de talent et chercheur : Tsiganes, ou ces inconnus qu’on appelle aussi Gitans, Bohémiens, Roms, Gypsies, Manouches, Rabouins, Gens du voyage, édité en aout 2022 aux Presses Universitaires de France.
Gabi, on se connaît depuis un moment et comme je m’intéresse au sujet, je suis allé voir cette exposition au Mucem de Marseille à laquelle tu participes et où tu as présenté à mon avis la proposition la plus forte, le « Musée du Gadjo ». Il m’a semblé que c’était un évènement assez important par rapport au regard généralement porté par les institutions de ce pays sur les communautés romani. Alors, je voudrais t’interroger sur tes motivations et la manière dont le travail collectif de votre comité d’expert s’est déroulé.
Cette exposition Barvalo est née à l’initiative d’un ethnologue étatsunien, Jonah Steinberg, qui s’étonnait qu’il n’y ait jamais eu en France d’exposition consacrée aux cultures des peuples romani dans leur globalité. Il remarquait aussi qu’on avait fâcheusement tendance en France, à confondre les peuples issus de cultures romani avec les « Gens du voyage ». L’équipe du Mucem a été sensible à sa réflexion et ils se sont mis à la recherche de personnes, majoritairement - mais pas uniquement - issues de ces cultures, susceptibles de travailler de façon collaborative sur les cultures romani. Un comité d’experts a été peu à peu constitué [1] et personnellement j’ai intégré l’équipe en 2017 pour préparer l’exposition prévue en 2023.
Le thème général choisi au départ, c’était les activités économiques romani, mais nous avons tout de suite voulu élargir la recherche, tout en précisant la démarche. L’un de nos arguments était qu’on ne peut pas plus parler des « métiers traditionnels des Gitans » que de « métiers traditionnels des Gadjé », ça n’est pas possible. Dans tous les peuples, il y a des personnes qui exercent divers métiers et c’est aussi le cas chez nous... On ne peut pas se contenter de réduire un peuple à une activité professionnelle. Nous avons voulu montrer le regard porté par les sociétés occidentales modernes sur les Romani et sortir des clichés en donnant la parole à des personnes issues de ces cultures au niveau politique, social, professionnel, culturel, artistique...
L’équipe constituée a travaillé de façon collective à toutes les étapes de la préparation de l’exposition, tout a été écrit, discuté ensemble, réécrit - le contenu, la scénographie -, pour trouver la meilleure manière de montrer au public des éléments de ce qui constitue l’existence de différents membres des cultures romani. On a longuement (et parfois vivement) discuté de ce qu’il fallait garder, par exemple pour les objets, ce qu’il était préférable d’enlever, jusqu’à ce qu’on trouve un bon compromis, un point d’accord...
Chaque groupe a sa propre vision et ça a été un laborieux et minutieux travail de longue haleine en commun. Par exemple, les représentants des « Gens du voyage » avaient tendance à vouloir homogénéiser nos différentes cultures derrière l’appellation « Gens du voyage », et beaucoup n’ont pas été d’accord. L’exposition s’est faite par une succession d’allers-retours qui ont abouti à l’élaboration des meilleurs compromis possibles. Nous avons décidé de donner à voir et à entendre tout ce sur quoi nous étions d’accord et de ne pas aborder les sujets trop conflictuels.
Et pour ce qui concerne le « Musée du Gadjo », que je considère la partie la plus intéressante (et drôle) de l’exposition, comment t’y es-tu pris ?
C’était au départ une volonté commune de l’équipe. L’idée était de démythifier l’image des tsiganes. Nous nous sommes dit qu’il serait bon et utile d’inverser le regard habituellement porté sur les peuples romani de façon à montrer ce que cette vision a d’absurde. La catégorisation caricaturale de l’image d’un peuple est un des premiers outils du fascisme, nous avons voulu rappeler le danger de ce processus. On m’a confié cette tache et j’ai mis deux ans à écrire et scénographier ce Musée du Gadjo. Le parti-pris était de travailler à partir de la représentation ethnographique des cultures dans les musées du début du vingtième siècle, comme ce fut le cas lors de l’exposition coloniale de 1931. Nous avons d’ailleurs un ami, Sasha Zanko, dont la famille a été exposée à l’époque au Jardin d’acclimatation. J’ai donc voulu montrer que si on catégorisait de la même manière les Gadjé, leur façon de se nourrir, de se marier, d’honorer leurs morts, etc., on réduirait leur image à une série de clichés, une caricature absurde. Au départ je voulais être beaucoup plus féroce, mais le Mucem est quand même un musée d’État, on ne peut pas tout y faire... Finalement nous avons abouti ensemble à un compromis qui donne ce Musée du Gadjo. C’est le résultat d’un long et minutieux travail préparatoire, de dessins, de textes, de scénographie, très détaillé. Je comptais utiliser pour ce projet des objets présents au Mucem, mais finalement, les responsables, qui craignaient sans doute un peu que je détourne ces objets de leur vocation initiale, m’ont demandé de faire des recherches à l’extérieur, alors je suis allé chiner et j’ai beaucoup aimé faire ça.
L’idée semble être de créer une sorte de choc dans l’esprit des visiteurs pour éveiller en eux, grâce à cet effet-miroir, une prise de conscience de tous les clichés que notre société, dominante, déverse sur les populations romani, minoritaires. Est-ce que tu as pu constater que cette prise de conscience se produit réellement ?
Je ne sais pas si ça fonctionne pour tout le monde. J’ai, par exemple, longtemps discuté avec une personne qui était persuadée que les objets réunis dans ce Musée du Gadjo venaient d’un vrai musée, et qui a longuement insisté pour que je lui dise où se trouve ce musée. J’ai eu beau lui expliquer qu’il s’agit d’une installation artistique, elle ne m’a pas cru. Mais ensuite je suis retourné au Mucem pour faire une série de petites vidéos-trottoirs sur le ressenti des visiteurs à la sortie de l’exposition et il y en a beaucoup qui trouvent la reconstitution de l’intérieur gadjo très réaliste « on dirait celui de ma grand-mère », etc. Ils connaissent tous quelqu’un dont l’intérieur correspond à cette image.
Il y a de très grandes discussions depuis longtemps, relatées par Patrick Williams notamment, autour des dénominations de ceux qu’on appelle souvent les Roms. Quel intitulé utilises-tu pour qualifier les populations sur les cultures desquelles vous avez travaillé ?
Nous avons beaucoup planché collectivement sur ce sujet et nous nous sommes finalement mis d’accord sur l’usage du terme « cultures romani », de préférence au vocable unifiant « Rroms », utilisé par des responsables associatifs ou des intellectuels qui siègent notamment à Bruxelles.
Est-ce qu’on peut dire qu’il y a une sorte de « guerre fratricide » à l’intérieur de ce monde des chercheurs et des penseurs de ce domaine, où de manières différentes et parfois opposées on se bat contre, non seulement l’essentialisation ce qui est très légitime, mais aussi toutes sortes d’approximations, dans la définition de ce que j’appelerai globalement le monde tsigane ?
L’approximation, c’est l’antichambre du fascisme. L’œuvre que j’avais intitulée « L’Apocalypse selon Saint-Nicolas » - il s’agissait évidemment de Sarkozy -, se référait aux lois permettant de discriminer ou même d’expulser les Roms. Dans son discours, il assimilait, dans un mélange très stratégique, les Roms et les Gens du voyage. Ce discours faisait de nous des étrangers de l’intérieur, des gens « pas comme les autres », qu’il est donc recommandé de maltraiter. On avait l’impression qu’il parlait de populations étrangères et non de citoyens français soumis aux même devoirs et bénéficiant des mêmes droits que les autres citoyens. Cela faisait de nous des êtres globalement suspects : à nous de démontrer le contraire... C’est le même phénomène que produisaient les carnets de circulation.
Pourtant l’approximation n’est pas systématiquement utilisée de façon hostile (comme dans le cas de Sarkozy), parfois elle peut être utilisée d’une façon bienveillante. Comme lorsque Patrick Williams raconte que lors d’une réunion festive un Kalderash désigne une femme en disant : « tu vois, elle, c’était une Gadji, maintenant elle est devenue une Sinti ».
Oui, mais lorsque des acteurs des cultures romani utilisent parfois des images d’Épinal en disant « tu vois, nous les Gitans, on est tous comme ça », ils desservent la cause, souvent dans un but de stratégie économique, pour vendre quelque chose. Il y a aussi les gens qui s’inventent un passé tsigane imaginaire, ou des origines fictives, pour répondre à certains fantasmes, de liberté, de cheveux dans le vent, etc.
Alors, si je te demandais de me dire en quelques mots ce que recouvre chacun des intitulés dont on affuble les membres de ces cultures ?
« Gens du voyage », par exemple, c’est une appellation administrative imposée par l’État français pour globaliser et homogénéiser l’ensemble de ces cultures. Gens du voyage ça n’a pas de singulier ! Eux-mêmes s’intitulent « voyageurs », ce qui est plus logique. Et si on prend la totalité de ceux qu’on appelle « Gens du voyage » en France, on en trouvera seulement vingt pour cent issus des communautés romani. Dans ces 20% tu as des Gitanos espagnols, des Sinté venus d’Italie, du Piémont, qui sont souvent des familles de cirque, comme les Zavatta, Bouglione, etc. Chez les Manouches il y a Django Rheinardt par exemple, parmi les gens connus, il y a ceux qui viennent d’Espagne ou du Portugal, avec entre autres les Gipsy Kings. Il est possible que Charlie Chaplin soit issu d’une famille de Travellers anglais, et puis il y a ceux qu’on appelle Roms, qui sont venus surtout des pays de l’Est, avec beaucoup de musiciens, de violonistes, etc.
Donc, ce sont à chaque fois des cultures et des modes de vie distincts...
Nous avons tous un socle commun, il y a un fond, un squelette de culture et de traditions. Il y a un socle linguistique, par exemple, nous utilisons tous le même mot pour désigner l’autre : Le Gadjo, avec de petites variantes, et c’est la même chose pour tous les éléments essentiels de l’existence. On parvient à se comprendre d’une culture à l’autre. Ce qui est assez étonnant c’est qu’au Rhajastan il y a une langue très proche des nôtres. Alors, les anthropologues en ont déduit que nous viendrions de cette région de l’Inde, et ils nous en ont informés, mais moi je n’en sais rien.
Donnes-tu crédit au récit de l’itinérance que raconte, par exemple, le film de Tony Gatlif Latcho drom ?
Oui, mais au sens figuré, symbolique, d’une culture qui s’est enrichie au fur et à mesure de son cheminement dans le monde. Sommes-nous partis de là-bas, ou avons nous reçu en héritage notre langue d’autres peuples venus de là-bas ? Je ne sais pas. Je pense que si nous sommes effectivement partis de là-bas, nous ne sommes pas tous partis en même temps. Je pense que ça s’est fait en vagues successive et que nous n’étions pas des Gitans à l’origine, mais que peu à peu, au fil des rencontres des croisements et des apports, culturels, artistiques, etc., nous sommes devenus des Gitans, des Manouches, des Sinté, des Roms...
Cette aventure historique culturelle et artistique me fait fortement penser à ce que dit le poète et philosophe martiniquais Édouard Glissant, lorsqu’il utilise le terme de créolisation, le choc de deux cultures dont la rencontre fait naître une troisième chose, une forme culturelle inédite qui ne dépend plus uniquement ni de l’une ni de l’autre de ces cultures initiales...
Oui, mais en même temps je pense que nous avons en nous une architecture intérieure qui prend le dessus sur les formes qui nous influencent ou nous inspirent. Une sorte de diapason intérieur qui nous fait sentir ce qui est « bien » ou « juste » et ce qui ne l’est pas. Nous absorbons des influences et nous les tournons à notre manière, nous les « gitanisons ». Les musiciens juifs qui jouaient de la musique romane étaient très influencés par ce qui se jouait à la cour des Wisigoths. Alors, le Flamenco, par exemple, c’est une émanation des cultures musicales judéo-arabo-andalouses, gitanisée par notre rythme, qui nous permet d’être ce que nous sommes au plus juste, et pas plus.
Ce qui a à voir avec la notion de « Duende » dont, par exemple, parle longuement Federico Garcia Lorca dans Jeu et théorie du duende ?
Pour moi, el duende, c’est le versant ésotérique du Flamenco... L’expression musicale qu’on nomme Flamenco est puisée dans un paquet reçu en héritage et qui, au contact des autres cultures, se revitalise. Les Gitans réfugiés dans les montagnes pour échapper aux rafles n’ont pas inventé la musique arabo-andalouse, ce Flamenco jadis aussi beaucoup joué par les paysans espagnols... Django n’a pas inventé le jazz, il a fait un jazz manouche, nous avons « gitanisé » ces formes culturelles.
Le jazz, qui était déjà le fruit d’un long parcours de créolisation, avec les bluesmen amérindiens, les esclaves noirs, etc.
Oui c’est un peu comme la Rumba, mélange d’inspirations amérindiennes d’Amérique du Sud, d’influences venues de Cuba, des esclaves noirs, le tout transformé d’un voyage vers les Amériques à un voyage vers l’Europe, et finalement récupéré par les Gitans. On a l’habitude d’appeler ça des « musiques d’aller-retour ». Oui, c’est une vraie créolisation. Et plus tard, ça prend une forme fixe qui se structure et se transmet rigoureusement, avec des codes précis qui varient suivant les styles.
Codé certainement, et rigoureux, mais pas académique. Ce que je ressens dans toutes les formes issues du monde tsigane et gitan, du violon de l’est au Flamenco, c’est une tension vers l’inaccessible, un cri qui est à la recherche de la transe. Or, comme il me semble comprendre que l’Occident s’est peu à peu débarrassé de ce phénomène de transe (certainement vers le 5ème siècle avant JC à Athènes), je crois y entendre un violent rappel, un souvenir très fort de ce que l’art a pu produire et qu’il ne produit pratiquement plus dans les sociétés occidentales modernes.
C’est ça qu’on appelle le duende, la quête de cet état second dans lequel tu comprends qui tu es et ce que tu vis, sans perturber le monde autour de toi. La transe c’est le moment où tu communies avec la vérité. C’est un moyen de soigner ton âme.
C’est ce qu’on voit dans une scène du film Exils de Tony Gatlif, où la comédienne entre réellement en transe au milieu d’hommes qui jouent de la musique et de femmes qui prennent soin d’elle. Je parle de ça parce que je crois que cette fonction thérapeutique fait partie des pouvoirs perdus de l’art en Occident.
L’art est devenu ici un moyen de spéculation et une production d’objets qu’on accroche sur des murs dans des salons, ça peut entrer en résonance avec tes meubles, mais ça n’est qu’un objet. Je veux bien qu’on fasse un art minimaliste, j’aime beaucoup ça en fait, mais à condition qu’on me raconte ce qu’on a voulu dire avec cette œuvre, c’est ça qui me touche, l’imaginaire de l’artiste. Je veux bien qu’on me vende une toile entièrement blanche si on me raconte ce qu’on aurait aimé voir dans ce blanc. Le premier homme préhistorique qui a pris le temps de sculpter le manche de son couteau, a donné du sens au manche de son couteau, c’est un outil pour couper, mais pas seulement, ça dépasse l’utilité première de l’objet... Ce n’est plus seulement un objet. Nous sommes les héritiers de ça, artistes d’aujourd’hui, de gens qui mettaient un peu de leur âme dans les objets de leur quotidien et ça ne doit jamais s’arrêter, c’est un mouvement permanent.
Ça me fait penser à ce qui se passe souvent en Afrique noire avec des objets comme des bâtons de pluie ou des masques qui ont un usage rituel précis et ont été transformés par les occidentaux en objets de musée, notamment à l’époque de la création du Musée de l’Homme.
Tant que du donnes un sens à l’objet, c’est de l’art. Les humains ont à l’intérieur d’eux un système d’équilibre et l’art permet en accentuant ou en diminuant certaines fréquences, pourrait-on dire, de rétablir cet équilibre quand il vacille. On voit ça en musique, dans l’écriture, dans les images, à chaque fois il s’agit de retrouver un équilibre, que ce soit parce que je m’y sens bien, ou que ça me dérange. Et ça m’oblige à accentuer, ou à diminuer certaines choses en moi. On se prend sans arrêt la tête au sujet du sens du mot « art », avec mes amis. Dans certaines expos auxquelles je participe, il arrive que, devant par exemple, mes « pattes de poules » certains disent : « ce n’est pas de l’art », comme s’ils détenaient la vérité absolue de ce que l’art doit être. En général, ce qu’il doit être selon eux, c’est : beau. La plupart des artistes que je vois parler de leurs œuvres se contentent de parler des matières qu’ils utilisent et oublient de parler du sens. Un peu comme si, à propos d’un film, tu ne parlais que de technique, des objectifs choisis, etc. En oubliant l’essentiel, pourquoi c’est fait, quelle est son utilité. Il y a deux ans, j’ai acheté à un artiste un protocole pour réaliser moi-même l’œuvre. Ça permet d’avoir toi-même cette sensation dans le palais du goût que ça peut procurer, et que chacun, d’une façon subjective, puisse la réinterprêter comme il le sent, avec sa démarche et le sens qu’il lui donne. C’est comme une recette de cuisine et c’est toi qui cuisines. Je trouve ça super, j’aime ça.
Et qu’en est-il aujourd’hui pour toi de l’expression artistique, notamment plastique, qui émane des créateurs romani ?
Le danger c’est de se laisser enfermer dedans, d’être prisonnier d’une case « art ceci » ou « art cela », de ne pas voir que la plus grande force de l’art c’est son universalité. Même si on puise dans un terreau spécifique et dans une subjectivité, on doit viser l’universel. On nous enferme dans des catégories, il ne faut pas se laisser enfermer.
C’est un rapport de force entre la société dominante et ses minorités et/ou tous ceux qu’elle a écrasés. « Votre art est sympathique, mais c’est nous qui décidons de ce qui a de la valeur ou non selon nos critères, nous sommes les maîtres du jeu... »
Oui, il faut être soi-même, avec sa subjectivité et pas seulement artiste de telle ou telle communauté. Le temps des artistes-représentants d’une culture spécifique est révolu. Aujourd’hui il faut passer à autre chose.
Quelle est ton actualité artistique ?
Je suis en résidence avec la Ville de Marseille, avec les gamins des bidonvilles, des centres sociaux et des quartiers nord, et j’interroge chaque personne avec qui je travaille sur son sentiment personnel au sujet de sa citoyenneté, de façon singulière et sans être pris en otage par sa communauté. Cela pour fabriquer une vidéo, des photographies, des dessins, des textes...
Je te laisse le mot de la fin.
J’appartiens à l’une des très rares communautés humaines qui n’ont jamais fait de guerre pour conquérir le territoire d’une autre. J’en suis assez heureux.