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L’indicible

dimanche 10 novembre 2024

Résonner en harmonie est-ce bien raisonnable ? Pour l’enfant de la Source que je suis, OUI,
Cœur et âme.
Mais voilà que depuis quelque temps, je m’égare. Je commence à comprendre le pourquoi…

L’indicible.

Ici où je vis depuis de nombreuses années au cœurd’une vallée où coule une rivière, une prairie me
protégeait près de la maison des autres prairies de maïs, une prairie sauvage… Quand je suis arrivée,
des vaches avec des cornes y paissaient tranquilles. Je passais beaucoup de temps avec elles, elles
faisaient cercle autour de moi assise dans l’herbe.

Elles broutaient mes cheveux, me donnaient parfois un coup de langue. On était bien ensemble.
Leur propriétaire me demanda un jour ce que je leur avais fait pour qu’elles soient si affectueuses ? Je les aime, avais-je répondu.

J’avais appelé l’une d’entre elles Kytie, qui arrivait dans une joyeuse galopade quand je criais son nom
qui résonnait dans la vallée.

Puis un jour elle fit son petit tout près de la maison sous le poirier comme si elle voulait que je les
protège. Le petit était tout humide encore quand le fermier arriva avec une planche en bois sur laquelle
il comptait emmener le petit veau. J’étais si triste, je l’ai alors obligé à prendre le petit dans ses bras et
non sur une planche dure. Je pleurais de rage.
L’harmonie était rompue. J’étais Kytie qui mettrait des jours et des nuits à pleurer son petit…
Il y eut aussi ce jour où toutes les vaches faisaient un grand cercle en beuglant vers le sol. Je m’approchai
pour comprendre ce qui se passait ; mon chat Farouk gisait au centre, mort : il avait voulu revenir à la
maison après avoir été heurté par un véhicule sur la petite route de campagne. Les vaches me
prévenaient. Avaient-elles aussi de la peine ?
Puis les années passèrent et les vaches n’eurent plus de cornes… Je n’arrivais plus à créer ce lien avec
elles.

Elles étaient craintives, désorientées. En réalité leurs cornes sont des antennes cosmo-telluriques, les
informations subtiles et sensibles ne passaient plus.
Elles avaient peur.

Puis il n’y eut plus de vaches.
Et puis un gros engin à scier vint couper les branches les plus basses des arbres.
Seule et désemparée, j’enlaçais un vieux chêne en hurlant mon cri de guerre ; Cara ma chienne mordait
les roues du tracteur. Le conducteur dut me croire folle, mais il renonça. Le chêne fut épargné. Horrible.
Je compris ensuite que le but était de pouvoir passer avec de gros engins, la prairie deviendrait artificielle
avec glyphosate pour parfaire le saccage.

Au fil des ans, les salamandres, grenouilles et crapauds disparurent de mon jardin que cette prairie
entoure, les grillons aussi et d’autres encore … En retournant la terre de cette prairie saccagée je ne
trouvais plus de vie, ni insectes, ni vers de terre. J’appelai alors le fermier qui me répondit,
« Laissez-nous travailler ! »

Moi, je n’arrive plus à dessiner, à écrire.
Quelque chose en 5 à 6 années s’était rompu. Mais quoi ? L’énergie subtile n’arrivait plus à
s’exprimer. Une incohérence vibratoire s’installait. Tout le vivant communie, le grand Tout est
indissociable. C’est le Souffle qui nous anime.

Corps éthérique d’une rose © Marie Poncet

Quand je suis arrivée ici, j’ai planté le tout premier rosier blanc. J’étais si heureuse lorsqu’il fit ses
premières roses que je dansais naturellement autour de lui et l’embrassais toujours au même endroit. Je
me rendis alors compte (conte ?) que les feuilles étaient devenues 3 fois plus grandes là où je
l’embrassais… Le rosier répondait à mon amour. Il fit 11 roses la première année, il vint à être abimé
par des travaux quelques années plus tard. Je décidai de prélever une branche indemne que je plantai. L’année d’après il fit encore 11 roses…

Comment ne pas être émerveillée ? J’ai pu photographier le corps éthérique d’une rose. Je n’en croyais pas mes yeux.
Sortir du silence alors qui étreint le cœur de ma vallée… Il reste encore des fleurs sauvages sur le talus des fossés, pour combien de temps ? Quelle est cette avidité morbide de l’Homme séparé de la Nature ? Comment vivre en perdant le SENS ?

« Ce qui ne vient pas à la conscience revient sous
forme de destin »

(CG Jung).

Marie Poncet
Octobre 2024.

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