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Tous intermittents, tous œuvriers ?
Appel à contributions !

Extension du domaine de la création
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par Valérie de Saint-Do
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Au moment où les intermittents défendent leur régime comme des lions, il est important de poser la question de son sens pour la création artistique. Chacun sait qu’il dérange (le MEDEF en premier lieu, mais aussi certains syndicats), c’est pour une question idéologique : il pose une définition du travail insupportable au capitalisme actuel. Nous proposons à nos amis, artistes ou non, d’en débattre.

Nous n’ignorons pas, bien évidemment, que le régime des intermittents est d’abord un régime social d’indemnisation du chômage chez les artistes et techniciens, et qu’il est difficile d’exclure de la réflexion les contraintes économiques et soci[...]

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4 commentaire(s)

MUNIER Corinne 16 juin 2014

Le mouvement des intermittents du spectacle doit être soutenu par le plus grand nombre !

Ce mouvement va bien au delà de la seule défense du statut des intermittents du spectacle mais il requestionne aussi la condition de tous les travailleurs, precaires et chômeurs.
La lutte des intermittents est notre lutte à tous contre le sous emploi et les inégalités sociales.

Défendre un régime des intermittents qui n’abandonne pas les plus précaires d’entre eux, c’est défendre le maintien de la culture en tant que bien de l’humanité ; c’est à dire le maintien d’un espace encore possible où l’on peut interroger la société, rêver à un monde meilleur, être sensibilisé à l’hospitalité et au partage.

Nous voulons voir des spectacles pour nous enrichir, nous voulons rire, partager, aimer, être étonnés ! Le néo libéralisme cherche à rentabiliser tous les secteurs mais aussi à supprimer tout ce qui peut réanimer nos consciences. Or notre dimension philosophique, poétique, politique culturelle est ce qui nous rend humains !

Face au pouvoir économique qui menace nos existences, nous devons défendre la nécessité d’une pensée libre ! Car une société qui met l’argent au dessus de tout et dépourvue de toute dimension éthique ne peut que se détruire elle même..

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Isabelle Bessis 14 juin 2014

Le dernier des intermittents

Comme tous les soirs de la semaine, le vieux Raphael a assisté les enfants du quartier dans leurs devoirs. Il a la chance, le privilège, de travailler encore à plus de 80 ans et fait partie des D.R(1). Toute sa vie durant Raphael a exercé son corps et son esprit pour ne pas finir, comme nombre de ses congénères âgés, dans les cités réservées aux N.R(2). Il lit sans lunettes, marche sans canne, et sa mémoire ne présente aucun signe d’altération. A dire vrai, Raphael est un modèle pour tous et il fait la fierté de sa famille. Ce jeudi de l’an 2155, comme tous les soirs de la semaine, Raphael attend impatiemment le moment où, accompagnés par d’autres D.R, les enfants partiraient dîner au Grand Réfectoire de Quartier (3), et le laisseraient en tête à tête avec son petit fils Noé. L’enfant n’a pas tout à fait fini ses devoirs et Raphael se plonge sans conviction dans le journal universel traduit dans toutes les langues, « Le quotidien du citoyen rentable ». « Grand-père, il y a un mot que je ne comprends pas dans mon devoir de catéchisme … Que veut dire « intermittent », ou « intermittente » ? Raphael sursaute, lâche le journal et s’approche de Noé. « Montre-moi où c’est. » « Là, regarde, c’est Saint Jean qui raconte un miracle du Christ qui a eu lieu « dans une fontaine intermittente ». Penché par-dessus l’épaule de son petit fils, Raphael lit le passage à voie haute :

« St. Jean, parlant du miracle de la piscine, décrit cette fontaine ; c’était ce que les physiciens nomment aujourd’hui une fontaine intermittente [it. ds le texte] : à Jérusalem, près de la porte des brebis, il y a une piscine qui s’appelle en hébreu Béthesda, et qui a cinq portiques. Sous ces portiques étaient couchés en grand nombre des malades, des aveugles, des boiteux, des paralytiques, qui attendaient le mouvement de l’eau ; car un ange descendait à certains moments dans le réservoir, et en agitait l’eau ; et le premier qui descendait dans le réservoir après que l’eau avait été troublée était guéri quelle que fût sa maladie. » (P. LEROUX, Humanité, t. 2, 1840, p. 866.).

« Hummm…Eh bien cela veut dire qu’à certains moments l’eau est immobile, comme habituellement l’eau des piscines, et qu’à d’autres, lorsque l’ange rentre dans l’eau, elle devient agitée » « L’ange agite l’eau avec ses grandes ailes tu crois ? » « Grand-pèèèèère ! Tu m’écoutes ??? Comment fait-il à ton avis ? ». Raphael, le regard noyé, semble en proie à une profonde émotion. Lorsqu’il reprend la parole sa voix est d’abord étouffée, puis étrangement vibrante. Noé, mi fasciné, mi inquiet, ne reconnaît plus la voix de Raphael. « Non, cet ange n’a pas d’ailes… et d’ailleurs dans cette histoire, il n’y a pas qu’un ange, il y en a plusieurs, beaucoup … et d’ailleurs ce n’étaient pas vraiment des anges… ». « Ah bon ??? Tu connais cette histoire grand-père ???!! Explique- moi alors ! Comment ils étaient ces « pas- vraiment- anges- sans- ailes » ??? » « Oui je connais cette histoire parce que mon grand-père me l’a racontée il y a très longtemps, lorsque j’avais à peu près ton âge… Alors ces anges étaient tous différents, des hommes, des femmes, des jeunes, des vieux, des grands, des petits, des gros, des maigres… Certains étaient comme déguisés et entraient dans l’eau en déclamant des histoires aux malades, d’autres en dansant, d’autres en jonglant. D’autres encore avec …des « objets », des objets qui leur étaient chers …Et alors l’eau s’agitait, et tous ceux qui entraient dans cette eau guérissaient … Il n’y avait pas que des aveugles et des boiteux sous les portiques tu sais, il y avait aussi des gens tristes, des gens qui s’ennuyaient, des gens qui se sentaient seuls… » « Je ne comprends rien à ton histoire, Grand-père…Comment peut-on s’ennuyer ou se sentir seul ??? Ils ne passaient pas leur temps à travailler, les gens, à cette époque ? Et quel genre d’objets emportaient-ils dans l’eau ??? » « Des objets qui n’existent plus de nos jours, des pinceaux, des feuilles de papier, des stylos (4)…Et c’était merveilleux d’être là avec eux, dans cette eau chaude qui tourbillonnait, éclaboussait, ou faisait de petites vagues… Oui, ton arrière-arrière- grand-père m’a dit que c’était merveilleux… ». Suspendu aux lèvres de Raphael, Noé attend qu’il continue son récit mais celui-ci est maintenant perdu dans une rêverie souriante. Il semble fixer un point loin derrière la vitre du salon « Peut-être qu’il voit tout ce qu’il a raconté, l’eau de la piscine en mouvement, les anges qui ne sont pas des anges, les malades qui guérissent ? » se dit l’enfant. « Grand-père ? Grand-père ? Parle-moi encore ! S’il te plaît !!! » « On les appelait comment ces hommes et ces femmes qui savaient agiter l’eau si on ne les appelait pas « anges » ? ». « Des artistes, c’étaient les artistes » (4). Raphael paraît maintenant tellement triste que Noé vient se blottir dans ses bras pour le consoler. Ils restent longtemps enlacés dans la pièce silencieuse, et Noé s’endort. Raphael le porte doucement dans son lit, le réveille pour lui donner ses pastilles nutritives, puis l’embrasse sur le front. « Dis-moi fiston… Hummm… Tout ce que je t’ai raconté ce soir… Heuh…J’aimerais mieux que tu n’en parles à personne. Tu veux bien me faire cette promesse ? » « Pas même à Maman et Papa ? » « Pas même à Maman et Papa, ils n’aiment pas ces vieilles histoires et ils me gronderaient. Alors c’est d’accord ? C’est notre secret ? ». Noé réfléchit en se frottant les yeux « Grand-père, je te promets mais à une condition ! » « Bien, laquelle ? » « Tu me raconteras d’autres histoires de ton grand-père et des artistes quand on sera tout seuls ? ».

1. Demi Rentables
2. Non Rentables
3. En 2155 les parents travaillent 15 heures par jour et n’ont pas le temps de s’occuper de leurs enfants. Cette tache est donc confiée à des DR
4. Termes aujourd’hui inusités, désignant des objets ou catégories de personnes qui n’avaient pas de lien direct avec le Profit.

http://www.facebook.com/isabelle.bessis Signaler

Gwenael De Boodt 14 juin 2014

Mesdames et messieurs les spectateurs, Monsieur le Maire, bonsoir !

Je m’appelle Gwenael De Boodt, ancien intermittent du spectacle, fondateur et directeur de cette Station-Théâtre mais aussi chômeur actif de longue durée non indemnisé.

Avec de petits moyens financiers qui comprennent les recettes de billetterie et quelques subventions de la communauté de communes du Val d’Ille et du département, notre petite Station-Théâtre se bat dans un contexte difficile en initiant concrètement les conditions d’un enrichissement culturel à long terme et pour tous. L’amour, la poésie, la philosophie, les représentations du drame, de la farce et de la tragédie, la beauté et la laideur, tout ce qui fait le sens et l’appréciation de la vie, nous unissent spectateurs et acteurs dans une exploration de notre âme sans laquelle l’avenir ne pourrait être que misérable et sans espoir. Le bénéfice de cette exploration commune dont les métiers artistiques sont le socle ne peut être rapporté à l’aune des choix économiques et politiques actuels dans un but de rentabilité immédiate.

Cet engagement pour une culture plus exigeante serait impossible sans le travail des compagnies, des artistes et des techniciens dits « intermittents ». Ils sont généreux, doués dans leur métier, consciencieux dans leur façon de le pratiquer et surtout, ils se vouent corps et âme et à plein temps à leur art. Ce sont notamment celles et ceux qui vont oeuvrer ici pour vous ce soir.

La mobilisation de ces intermittents du salaire mais non de leur métier est actuellement sous les feux de l’actualité. Ils s’opposent à la ratification de l’accord Unedic entre le Medef et des syndicats qui ne sont représentatifs ni de leur profession ni de la grande masse des travailleurs précaires qui ne cesse de s’accroître. Cette mobilisation porte l’espoir d’une alternative culturelle et sociétale forte. Il ne s’agit pas d’une revendication corporatiste comme le laissent entendre les médias les plus regardés et les plus écoutés. Il s’agit d’un combat politique au sens noble du terme.

Car toute profession devrait être mise en perspective d’un projet de société. Cela soulève des questions d’ordre global. Nous devons absolument démentir l’impossibilité d’une alternative pour préparer une société plus juste, plus solidaire, plus humaine et plus éclairée.

Salariés, chômeurs, petits employeurs, élus de la République, nous ne pouvons nous dédouaner de cette responsabilité.
C’est la raison pour laquelle aujourd’hui le monde de l’art et de la culture a besoin de votre soutien et vous demande de prendre partie, lors de vos discussions au quotidien comme dans vos prises de parole publique à vos divers postes de responsabilité, pour le mouvement des intermittents et des précaires. Ils demandent le retour à la prise en compte de 507 heures de travail salarié sur 12 mois pour ouvrir leur droit aux indemnités de chômage. Ces indemnités sont justifiées puisqu’ils continuent de se consacrer pleinement à l’art du spectacle vivant bien au-delà de ces 507 heures.

Merci.

Je vous souhaite une bonne soirée avec le théâtre Berloul et la Cie Staccato dans « Le Médecin malgré lui » de Molière.

http://stationtheatre.canalblog.com Signaler

olivier schneider 12 juin 2014

Pour ma part je souhaiterais qu’on réfléchisse à l’invention d’un statut d’intermittent au niveau européen. Il me semble que l’intention première de l’intermittence était de permettre une vie digne aux différents acteurs, artistiques et techniques des tournées. C’est l’intermittence qui a permis la diffusion d’une culture vivante dans toute la France. Il est tout à fait défendable qu’aujourd’hui on puisse garantir aux artistes et aux techniciens en déplacement en Europe, le minimum pour vivre. Ainsi, il y aurait véritablement une Europe culturelle vivante, une éducation populaire européenne, bref une démocratie possible.

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