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« Réfléchir à l’évolution des Maisons de la Culture »... Mais elles n’existent plus !

Fâchons-nous avec le milieu !
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par Valérie de Saint-Do
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C’est annoncé avec fracas et mis en place en grandes pompes.

L’Élysée a pris note de ce que la Culture en France était importante.

Doit-en s’en réjouir ?

Il eût fallu, pour cela, que l’annonce la la création du « Conseil pour la création artistique » réuni par Marin Karmitz et présidé par l’omniprésident ne se place pas... sous le signe de l’inculture historique !

Je cite un extrait de la dépêche d’agence, reprise uniformément – et sans vérification– par mes distingués confrères :

« Le Conseil va réfléchir à l’évolution des maisons de la culture, nées dans les années 60, pour les adapter au nouveau siècle » afin de « faire de celles-ci des "lieux totalement ouverts" de partage du savoir, qui fonctionneraient aussi le dimanche et le soir "pour que les gens puissent s’y rendre quand ils ne travaillent pas". »

Fort bien. À un détail près.

Même si des équipements portent encore ce titre, les « Maisons de la Culture », telles qu’elles ont été conçues par Malraux, n’existent plus !(1)

Sans assommer nos lecteurs avec un cours d’histoire des politiques culturelles en France, quelques petits rappels :

Les Maisons de la Culture étaient le fer de lance de la politique de Malraux après la création du ministère des Affaires culturelles en 1959. Pendant la décennie précédente, sous l’égide de Jeanne Laurent au secrétariat d’État aux Beaux-Arts, la décentralisation dramatique avait mis en place des Centres dramatiques nationaux, dirigés par des metteurs en scène, avec des troupes permanentes, ayant pour mission de créer et jouer dans les régions.

Dans la vision quasi-mystique de Malraux, le rôle des Maisons de la Culture étaient tout autre et complémentaire : « cathédrales de la culture », elles devaient accueillir toutes les disciplines artistiques, diffuser le meilleur de la création, et en même temps, dans leur toute première conception (mais c’était l"objet d’un âpre débat) offrir une place aux artistes débutants, aux associations, aux fédérations d’éducation populaire) ... Elles étaient financées à 50/% par l’Etat, 50% par la ville d’implantation.

(On ne reviendra pas ici sur les débats multiples qui ont émaillé leur parcours, entre "animation " et "création", place de l’éducation populaire ou diffusion de l’excellence..)

Mais toujours est-il qu’à l’usage, malgré les réussites d’hommes tels que Francis Jeanson et Gabriel Monnet, ces gros paquebots, au cahier des charges monstrueux, se sont révélés souvent des monstres à gérer. Et leur image de cathédrales d’une culturel labellisée a, trop souvent, éloigné d’elles les populations qu’on voulait précisément y attirer, l’aspect "éducation populaire" ayant été très vite mis aux oubliettes. Le ministère leur a préféré fin des années 70/ début des années 80 des centres d’animation culturelle, de taille plus modeste, moins coûteux, dont la mission était de diffuser des spectacles. (Et le financement n’était plus assuré à un tiers par l’État).

Ce fut le début de la distinction, technocratique et discutable, entre la création de spectacles vivants, apanage des centres dramatiques et chorégraphiques, et leur diffusion confiée à ce qui est devenu en 1991 des "scènes nationales" (label regroupant les CAC et les anciennes "maisons de la Culture").

(Au fait, il existe 62 scènes nationales en France, et toutes sont ouvertes le soir et le dimanche, parce que c’est à ce moment là que des gens viennent voir des spectacles).

Alors, de quoi parle-t-il, le désormais président du "Conseil pour la création artistiques, qui veut des "maisons de la Culture ouvertes, même le dimanche ?" De récréer des paquebots dont la lourdeur et le coût de fonctionnement rendent difficile souplesse et expérimentation...

À moins que... le Président, dans son ardeur de néophyte, n’ait confondu Maisons de la Culture et MJC (maisons des jeunes et de la Culture), ces dernières (que l’on ne doit pas à Malraux) ayant joué un rôle essentiel dans une action culturelle de proximité, avant de s’assoupir gentiment, méprisées par les ténors de "l’excellence" ? Des équipements effectivement à revoir et rénover, mais qui pourraient jouer un rôle essentiel en balayant les vieilles frontières entre "artistique" et "socioculturel" ? Et même être "ouverts le dimanche" ? (NB/ pour celles qui restent actives, c’est déjà le cas !)

Ce serait la seule lecture pertinente de son invervention... mais nos yeux se dessillent vite :

« Aider tout le monde faute de savoir discerner la qualité, c’est de mon point de vue créer une formidable injustice. Il faut faire des choix. »

Traduction : de cesser de financer ceux qui n’obéiraient pas aux critères d’excellence dudit conseil.

Place au darwinisme artistique !

De fait, le gouvernement est en train de sacrifier totalement les crédits de l’Education populaire et de l’action culturelle

L’inculture du résultat, une fois de plus. Quant à la diversité...Pour la classe politique, elle n’existe que face à l’international.

Autrement dit, il n’y a pas que Hollywood dans la vie, il y a aussi les Cht’is.

Quant à défendre la diversité artistique sur le territoire national... « Il n’y a plus de crédits. »

Juste un léger oubli au passage : l’excellence artistique ne relève pas du créationnisme ni de la génération spontanée et a toujours jailli d’un terreau d’expériences, parfois balbutiantes, maladroites, inachevées.. les grands ont aussi connu des débuts,... souvent dans l’Éducation populaire !

Mais de celà, nous aurons l’occasion de débattre sur ce blog...

À suivre...

P.S. Au passage, serait-il possible de suggérer à nos éminents collègues de France-Culture, plus précisément de Culture-matin, de lire quelques livres sur l’histoire des politiques culturelles en France ? Cela pourrait peut-être éviter au très pontifiant Alexandre Adler de déclarer péremptoirement que c’est Malraux qui a mis Jean Vilar à la tête du TNP à Chaillot (C’est Jeanne Laurent, en 1951 !)

, 1. La Maison de la Culture d’Amiens reste la plus proche de la conception initiale.



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